Le Dernier Jour d'Un Condamné
On ne sait rien ou presque de lui. Ni son nom, ni son âge, ni le crime qu’il a commis. La première, et quasi seule, chose que nous apprenons est qu’il est condamné à mort. Ça tombe bien, avant le jugement, il préférait « plutôt cent fois la mort » que les travaux forcés à perpétuité. Et puis, revenu dans sa cellule de Bicêtre, il prît conscience de la signification de ce châtiment. Il lui restait alors six semaines avant de monter sur l’échafaud. Le condamné à mort profitera de ses dernières vingt-quatre heures pour relater ce qu’il a vécu et ressenti durant cette période funèbre.
Le Dernier Jour d’Un Condamné est un plaidoyer pour l’abolition de la peine de mort. Victor Hugo en choisissant un exemple neutre veut démontrer l’universalité de sa thèse. Quelle que soit la personnalité de l’assassin et la nature du crime, Hugo combat la peine de mort dans une époque où la guillotine est un des spectacles les plus courus par le peuple. En même temps c’est sans doute le seul qui fût gratuit.
Si le condamné est reclus dans une cellule de « huit pieds carrés », le lecteur, lui, est emprisonné dans la boite crânienne de ce type tout à fait normal, pas plus agressif ni dangereux que le commun des mortels, mais qui a commis un crime. Il nous raconte la froideur de la procédure judiciaire, les conditions de détentions dans une geôle où sont rassemblés les condamnés à de très lourdes peines, quelques souvenirs et bien évidement ce que peut représenter le fait d’être condamné à mort. Ou plutôt de connaître le moment de la fin, car le condamné sait que de toutes façons nous ne sommes tous que des condamnés à mort en sursis.
Le Dernier Jour d’Un Condamné date d’il y a presque deux siècles et il ne sent absolument pas la poussière. Ce roman a su traverser les époques avec une modernité intacte. Bien sûr, tout dans ce livre est ancien, son contexte, ses références, le régime politique, nous renvoie au début du 19ème siècle, mais au contraire de certains romans chroniqués en ces lieux, il n’a rien perdu de sa fraîcheur. Vous le savez, en France, l’abolition de la peine de morte date de 1981. Aujourd’hui un quelconque débat sur ce sujet est tabou. Ceux qui ont moins de quarante ans ne peuvent sans doute pas se rappeler de ce combat qu’ont mené les abolitionnistes pour démonter la guillotine. Ce chef d’œuvre de Victor Hugo, bien que je ne partage pas forcément son avis, est un témoignage exceptionnel d’une époque où ce combat était bien loin d’être gagné et vous marquera sans doute au fer rouge. Pour moi, sans conteste le meilleur livre de ce premier trimestre.
Verdict : Chapeau Victor !
(Vous avez échappé à : Et à la fin le héros, il meurt et Mais que fait Jack Bauer ?!)
Le Dernier Jour d’Un Condamné, écrit par Victor Hugo, éditions Folio Classique, publié en 1829