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Textes Blog & Rock and Roll
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17 juin 2011

C E S (3ème partie)

dedale

 

 

Morrison avait déjà noirci deux pages pour son rapport. Il restait désespérément allergique à toute forme de technologie, il avait bien essayé de travailler avec un ordinateur mais les résultats s’étaient avérés catastrophiques. Rien de plus simple qu’un stylo et une feuille. A peine avait-il narré l’épisode du tir au Taser manqué que sa main se suspendit au-dessus du papier. Un détail clochait. Pire que ça même. Il était maintenant foutrement dans la merde.

-Mais quel con ! cria Morrison en se tapant le front.

Le temps d’attraper son képi en passant la porte et se précipita vers l’escalier. Le type de la relève, il ne l’avait jamais vu, lui, le chef du bloc 6. Le gardien venu le remplacer n’en était pas un, et si ce n’était pas un gars de la maison, c’était forcément une menace. Il remonta à la hâte au sixième étage. En pénétrant dans le couloir il cria pour signaler sa présence à qui voulait bien l’entendre. Personne ne répondît, Morrison s’y attendait. Cela se confirmait, aucun collègue dans les parages. Mais impossible de maîtriser un inconnu seul dans un couloir carré, autant essayer de choper son chien en courant autour d’une table. Sans oublier le fait qu’il n’y avait peut-être plus personne au sixième étage. Il fallait quand même s’en assurer et Morrison demanda avec son talkie walkie qu’on lui envoie deux collègues. Mais les mauvaises nouvelles continuaient de tomber, le central était dans l’incapacité d’accéder à sa requête. Et pour cause, dans la cour un gardien était pris en otage par un fugitif.



- Ecartez-vous ou je l’égorge, hurlait un homme menaçant un gardien avec une lame. Ouvrez cette putain de porte ! Allez !

James avait le bras droit replié dans son dos et le cou offert à son ravisseur. En sortant du bloc 6, tout s’était passé très vite. A peine avait-il fait deux mètres dehors, qu’un homme l’avait immobilisé. James n’avait pas compris ce qu’il se passait, il sentait juste qu’il ne fallait pas réagir. Puis la peur a cédé à l’excitation. Toutes les lumières étaient braquées sur lui et l’homme au couteau. James sentait ses forces redoubler, plus le temps passait plus la sortie approchait. Les gardiens n’osaient rien faire, ils tenaient en joue le ravisseur, mais la peur de tuer un collègue les paralysait.

Un gars de l’équipe hygiène et sanitaire sortit en courant de l’infirmerie, il filait ventre à terre vers le central. Morrison se trouvait dans le hall du bloc 6 lorsqu’il vit l’homme en blouse blanche.

- Que se passe-t-il ? cria Morrison.

- Le type qu’on a intercepté tout à l’heure. Ce n’est pas le fugitif, c’est Jones, un gardien du bloc 3, répondit l’infirmier essoufflé.

- Jones ? Jones… Et mon inconnu du sixième étage… ça veut donc dire que dehors…

Il poussa la double porte de toutes ses forces, prêt à hurler ses ordres. Mais au même moment un souffle l’envoya valdinguer plusieurs mètres à la renverse. Une explosion venait de retentir du côté du mur ouest. Une épaisse fumée noire se dégagea, tous les gardiens étaient au sol dans la cour. Morrison se releva tant bien que mal et eu juste le temps de voir les deux fugitifs se faire la malle au travers du mur. Il ordonna d’abattre les deux fuyards mais personne ne fût en mesure de le faire.

James se laissa aller dans le mouvement. Son ravisseur le menaçait toujours d’un couteau et se servait de lui comme d’un bouclier humain.

    

Ça y’est je sors !

        

Une Jeep, moteur en marche, sur laquelle se tenait à l’arrière un lance-roquettes était à une trentaine de mètres du mur en ruines. James, poussé par son ravisseur monta dans la Jeep, et entendit quelques balles ricocher sur la carrosserie pendant que la Jeep s’éloignait du cahos. Quelques minutes plus tard, James n’était plus un otage. On l’avait gentiment balancé dans un fossé, sans prendre le temps de s’arrêter bien sûr. Il roula sur lui-même pendant une bonne centaine de mètres et fût par chance stoppé dans sa descente infernale par un buisson touffu. Il était temps de reprendre ses esprits. Mais il sentait ses forces décliner. James s’enfonça plus profondément dans le buisson, s’allongea et s’endormit.

      

- Morrison ! Qu’est ce que c’est que ce bordel ? demanda le Directeur de l’établissement. Votre équipe est incapable de surveiller des mecs qui dorment ? Ca va chier pour vous, je vous préviens.

- Monsieur le Directeur, balbutia Morrison. Je ne comprends pas ce qui s’est passé. Je ne m’explique pas comment c’est arrivé.

- Ce n’est pas compliqué Morrison ! Je vais vous expliquer, vous êtes tous des incapables au bloc 6, c’est bien pour ça qu’on vous donnait à garder des comateux ! Même ça vous n’êtes pas foutus de le faire !

Le Directeur se rassit dans son fauteuil et se mît la tête dans les mains.

-  Je suis foutu…foutu. Ils vont me tuer. Si j’ai de la chance ils feront ça proprement…

-  Qui ça ils, Monsieur le Directeur ?

-  Oh, souffla le Directeur, moins vous en savez Morrison, mieux ça sera pour vous. Si vous voulez sauvez votre peau, retrouvez-les.

-  Nous avons envoyé les chiens Monsieur.

-  Les chiens ? s’étonna le Directeur. Les chiens… On ne cherche pas un os au fond du jardin Morrison. Bah… laissez tomber. Il ne faut absolument pas que cette affaire s’ébruite à propos du bloc 6. Par contre pour l’évadé du bloc 3, prévenez la police.

           

Un arbre. Le tronc large, les feuilles sont vertes et denses. Deux grands corbeaux noirs volent au dessus sans y prêter la moindre attention. Au pied de l’arbre, un cheval blanc broute négligemment à l’ombre une herbe jaunie par le soleil de plomb qui semble cogner à cet endroit. Autour de lui, quelques pommes tombées de l’arbre ne semblent pas l’attirer. Plus loin, dans le fond du paysage, en contrebas, une ferme blanche, immaculée, et des champs de différentes couleurs. Une fumée grise, déformée par un léger vent, s’échappe de la ferme.

James ouvrit les yeux, et entendit des aboiements ainsi que des voix au loin. Il resta le plus immobile possible, attendant que tout le monde s’éloigne pour sortir de son buisson.

             

Libre, je suis libre. J’ai rechargé les batteries. Mais je ne comprends toujours pas ce qu’il se passe. J’étais dans une cellule avec trois individus qui me ressemblaient traits pour traits. Je ne sais pas qui sont ces gens. Mes frères ? Mais si j’avais des frères je m’en souviendrais non ? Je ne me souviens de pas grand-chose. Ok depuis mon réveil dans la cellule, pas de problème mais avant… Rien, à part cet arbre que j’ai vu deux fois en rêve. Ce n’est pas une coïncidence. Impossible. Ou alors je n’ai pas de frère et ça expliquerait pourquoi je ne m’en souviens pas. Et si ce ne sont pas mes frères, comment l’expliquer ? Des clones ? Des clones ! J’ai été cloné. Ou alors je suis un clone. Je suis un clone ?

        

  Cette dernière pensée terrifia James.

             

Non je ne suis pas un clone, je raisonne, j’ai des souvenirs, enfin au moins un, je ne peux pas être un clone. Descartes ne disait-il pas je pense donc je suis ? Ah oui tiens, je sais qui est Descartes, je ne peux pas être un clone. René Descartes, né en 1596 mort en1650 est un mathématicien, physicien et philosophe français. Bla bla bla… Ok, je ne suis pas un clone. Mais ça n’explique pas ce que je faisais dans cette prison.

               

Les chiens se turent, les oiseaux piaillaient à nouveau. James sortit de son buisson et continua de dévaler la pente dans les bois. Il entendit le bruit des voitures au loin, il aperçut alors une route, filant droit à travers les arbres. James s’approcha discrètement de la bande de bitume, il enleva son uniforme de gardien. Il était à nouveau vêtu de son pantalon noir et de son maillot de corps blanc. Le fugitif du bloc 6 marcha le long de la route sans vraiment savoir dans quelle direction aller. La lumière du jour lui faisait beaucoup de bien, il se sentait indestructible sous ce soleil de plomb.

Un énorme camion blanc dépassa James puis se mît à ralentir. Ce dernier n’y fît même pas attention. La porte passager s’ouvrit lorsque James arriva à sa hauteur.

-          Vous allez où ? demanda le chauffeur du camion.

-          Je vais…je vais…par là, répondit James en tendant le bras.

-          Allez montez, j’y vais aussi je vous y emmène, proposa le routier en rigolant.

James hésita un instant, puis rassuré par le sourire du type, grimpa dans la cabine et referma la portière derrière lui.

   

       

(à suivre)

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