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30 mai 2012

Jubilons tous ensemble

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     Liberté, égalité, fraternité. Ces trois mots trônent fièrement sur le fronton de toutes nos mairies. Tout le monde le sait, cette devise puise ses origines dans la Révolution Française qui est le mythe fondateur de notre nation. Pourtant cela ne devient le premier symbole de la France qu’en 1880 sous la IIIème République. Le Français se targue d’être un révolutionnaire en puissance, même s’il ne veut jamais que rien ne change, et s’il ne devait que connaître uniquement deux dates de notre Histoire ce serait 1789 et 1968. Pourtant peu de gens savent vraiment ce qu’a été la Révolution. Notamment qu’elle a surtout bénéficié aux Bourgeois qui ont fini par prendre la place des Nobles à la tête du pays, et qu’elle n’accordait le droit de vote qu’aux mâles atteignant un certain seuil d’imposition. En gros les pauvres ne votaient pas et il n’était pas question que les femmes se mêlent de ce qui ne les regardait pas. Egalité. Et on passera pudiquement sur la Terreur qui fit 500 000 prisonniers et 100 000 morts. Une dénonciation anonyme suffisait à faire mettre au cachot son voisin, dans le meilleur des cas, à le faire guillotiner sans procès au pire. Fraternité.

    Depuis, dans l’imaginaire collectif, le Français est animé d’un vent irrésistible de liberté, d’indépendance, vivant dans un pays où on n’hésite pas à couper les têtes couronnées qui voudraient oppresser le peuple. Ce qui historiquement est, je crois, une grossière erreur car Louis XVI n’avait rien d’un tyran. Mais toujours dans cet imaginaire collectif Louis XVI serait donc le dernier monarque français. Et pourtant après lui il y eut bien deux empereurs (Napoléon et Napoléon III) et trois rois (Louis XVIII, Charles X et Louis Philippe). Je ne compte pas ceux qui l’ont été très peu de temps entre deux régimes mais qui n’ont pas été proclamé. La palme revenant à Louis XIX qui a été techniquement roi pendant 20 minutes entre l’abdication de son père et la sienne, à la suite des Trois Glorieuses de 1830. Finalement le dernier souverain en exercice, Napoléon III, a quitté le pouvoir en 1870, soit il y a un tout petit peu plus de 150 ans, presque un siècle après la Révolution Française. Depuis les Républiques se sont succédées avec plus ou moins de bonheur, les femmes ont pu voter après la Seconde Guerre Mondiale et le Président de la République élu directement par le peuple depuis 1965. Ce qui au regard de l’histoire de notre pays, généralement fixée à l’avènement de Clovis en 481, porte sur une période insignifiante.

    Mais soit, le passé n’est pas le présent, même s’il l’a forgé, et notre pays est désormais une République laïque où le peuple élit directement ses dirigeants et ses représentants. Le concept de royauté fait désormais référence à quelque chose de totalement anachronique et complètement dépassé. Pourtant une question me taraude. Et si on y revenait à la monarchie ? Pas une monarchie de droit divin à l’ancienne où le Roi avait droit de vie ou de mort sur ses sujets. Non une monarchie constitutionnelle comme il en existe en Espagne, au Royaume Uni, en Belgique,  au Pays-Bas, En Norvège, en Suède. Pas si anachronique que ça finalement comme concept la monarchie. Et puis il faut croire que les Français adorent ça la royauté quand on voit à quel point ils s’intéressent aux têtes couronnées qui nous entourent. Personne n’a oublié la période bénie pour les télévisions et les journaux people lorsque le Prince Albert de Monaco et le Prince William se sont mariés. Pas ensemble, ne paniquez pas. Il n’y en avait plus que pour ça, on a pu suivre les cérémonies sur toutes les chaînes, publiques notamment, et on connaissait tous les détails concernant les préparatifs, le déroulement des festivités, les voyages de noces, ne manquaient que les sex-tapes des nuits de noces. J’ai le souvenir également que la cérémonie d’investiture du Roi des Belges fut diffusée en direct à la télévision française. La France, autoproclamée berceau de la République et régicide, se délecte à foison du faste et des frasques des monarchies voisines lorsque la logique voudrait qu’elle n’y consacre qu’une indifférence polie.

    D’ailleurs ne nous y trompons pas, notre République a souvent pris des airs monarchiques. De Gaulle se serait bien imaginé en fondateur dynastique, Giscard avait une allure très aristocratique, Mitterrand se comportait plus comme un roi que comme un Président, et sous la présidence de Sarkozy il a été beaucoup question de ses héritiers et des apparitions divines de Carla, qui faut reconnaître s’y connaît en matière de charme. Bref tous les cinq ans, le pays se met en transe et doit choisir son nouveau « roi ». D’ailleurs en lisant et en entendant tous ce que les militants racontent à propos de leur candidat on à l’impression que celui-ci va redresser la France en quinze jours, multiplier le pain et guérir les lépreux rien qu’en les touchant. Les cérémonies d’investiture sont de véritables sacres républicains où la couronne est remplacée par le grand collier de  la Légion d’Honneur et la traversée de Paris en carrosse par une décapotable escortée de motards. Il ne manque qu’une messe à Notre Dame ou à Reims, et je m’en félicite.

    A l’approche du Jubilé de Diamant d’Elizabeth II, le cirque recommence. Les émissions spéciales vont se succéder et bien sûr nous ne raterons pas une miette de toutes les célébrations qui vont rythmer le Royaume Uni  ces prochains jours. Et nul doute que l’audience sera au rendez vous dans notre pays schizophrène.

    Si tous ces pays, finalement assez semblables au notre, ont choisi de garder leur monarchie, voire même de la réinstaurer récemment comme Espagne, c’est qu’il doit bien y avoir une raison. J’en vois plusieurs. D’abord, historiquement, cela permet d’établir un lien intemporel, une sorte de continuité. Dans le cas de la France on voit bien que dans les esprits il y a une nette cassure dans notre Histoire avec la Révolution, même si c’est un mythe. Comme si tout ce qui avait existé auparavant ne faisait plus partie du processus ayant conduit à faire de la France ce qu’elle est aujourd’hui. Politiquement ensuite, et dans le cadre d’une monarchie constitutionnelle évidement, le fait d’avoir un roi ou une reine, placerait quelqu’un au-dessus du jeu politique et des manigances partisanes. Ce que le Président de la République est censé être, mais qu’il n’est plus, s’il l’a un jour été. Aussi, le fait de savoir qu’on ne pourra jamais se battre pour atteindre les pleins pouvoirs dépassionnerait les débats. Et on ne fait pas de bonne politique dans le bruit et la fureur, même si j’imagine que la vie politique de nos voisins ne doit pas ressembler à un long fleuve tranquille. D’autre part une figure monarchique pourrait également être la voix de la France et une sorte de super VRP dans le monde sans pour autant être toujours sur le pont. C’est justement la rareté des interventions qui fait leur force. Enfin, une monarchie donne l’occasion à tout un peuple de se retrouver, de se rassembler pour quelques évènements rythmant la vie du pays tout entier, que ce soit dans le bonheur ou dans la peine. Souvenons-nous de la liesse populaire de 1998. Certes ce fût finalement bref, mais pendant quelques semaines les gens se sont majoritairement sentis mieux, heureux d’être Français. La même joie fut ressentie dans le cœur de la majorité des Britanniques parce que le petit fils de la Reine venait de se marier. Ce fut la même chose lorsque son père épousait Diana, et ce sera la même chose lorsque William présentera ses futurs enfants au balcon de Buckingham. Ça ne change rien à la vie des sujets de sa Très Gracieuse Majesté, mais pendant un moment, le pays se rassemble, se ressoude et partage des valeurs positives communes.

   Plus je vois ce que nous faisons de la République, plus je m’aperçois de la place que prend les noblesses étrangères dans les centres d’intérêts de nos concitoyens, et plus je me dis qu’il serait peut-être temps d’avoir à nouveau une monarchie Made In France. Mais attention, pas une monarchie avec toute une classe aristocratique propriétaire du pays. Hors de question d’avoir un Duc de Bretagne, un comte de Haute Savoie, ou un Baron du Hainaut. Juste une famille royale restreinte au monarque en exercice et ses enfants, dans le cadre d’une monarchie constitutionnelle où les pouvoirs principaux sont aux mains du Parlement.  Bon maintenant, après cet exposé vantant les mérites d’une éventuelle Restauration, se pose le problème de savoir qui nous allons remettre sur le trône. Il y a bien un prétendant « légitime » en la personne du Comte de Paris, mais bon, comment dire sans commettre un crime de lèse majesté… Ah j’ai trouvé. Le fil de l’Histoire a été rompu et quitte à recommencer, autant prendre une pelote toute neuve. Alors qui ? François Hollande, nouvellement  élu Roi des Français par le suffrage universel ? Impossible, quand on voit à quel point notre pays est déchiré politiquement parlant. C’est bien là le noeud du problème et les Français devront encore longtemps, je crois, se contenter des monarchies étrangères plutôt de profiter de celle qu’ils rêvent secrètement d’avoir.  

 

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Commentaires
C
J'aime bien cette idée, côté évènementiel ça nous changerait du foot !
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